Inégalités de revenus : après impôts, la France dans la moyenne, mais avant impôts, elle est parmi les plus inégalitaires

Bien que la France apparaisse relativement égalitaire après redistribution, elle figure pourtant parmi les pays les plus inégalitaires de l'OCDE avant impôts et prestations sociales.

« En matière d’inégalités, la France est un élève moyen si l’on s’en tient aux pays les plus riches et que l’on raisonne après la redistribution effectuée par les impôts et les prestations sociales. L’Hexagone se situe en position intermédiaire entre les pays du nord de l’Europe, qui font bien mieux, et les pays anglo-saxons et l’Italie par exemple qui font moins bien.

Avec un indice de Gini1 de 0,298, la France se situe entre les Pays-Bas (0,295) et l’Allemagne (0,303). Les pays qui font vraiment mieux sont la Belgique, la Pologne et les pays du nord de l’Europe (Norvège, Danemark, Finlande et Suède). Le modèle social scandinave, même affaibli par les réformes récentes, demeure performant. À l’opposé, les pays les plus inégalitaires sont l’Italie, le Japon et surtout les pays anglo-saxons (États-Unis et Royaume-Uni), très riches mais où les prestations sociales sont beaucoup moins développées.

 

Ces données sont établies après impôts et prestations sociales, ce qui permet de comparer les niveaux de vie dont on dispose pour épargner ou consommer. Le classement change complètement si on mesure les inégalités avant redistribution : ce que chacun perçoit, à la base, de son travail ou du rendement de son patrimoine (des loyers par exemple). Les pays les plus égalitaires sont la Hongrie, la Suisse et la Corée du Sud. Les pays les plus inégalitaires sont les États-Unis, le Royaume-Uni et... la France. Dans une étude, l’Insee a montré que les écarts de revenus avant redistribution ont fortement progressé dans notre pays depuis le milieu des années 19902.

La prudence est de mise avec ce classement, tant les méthodes de mesure divergent (voir encadré). Quoi qu’il en soit, la thèse assez répandue selon laquelle notre pays est très égalitaire est tout simplement fausse. Les écarts se réduisent après impôts et prestations sociales, mais l’Hexagone distribue de manière très inégalitaire les revenus à la base. Or, ce qui compte le plus souvent pour la population, c’est ce qu’elle retire de ses propres activités, en particulier de son travail qui représente 80 % de ses revenus. C’est de cette manière que l’on se compare aux autres. Les impôts et les prestations sociales viennent ensuite.

Comment expliquer la situation de la France ? Des éléments liés à la façon de mesurer les revenus pris en compte peuvent jouer, en partie. On sait aussi que la France est l’un des pays où les riches sont parmi les plus riches. Que notre pays est l’un de ceux où les écarts entre les élèves sont les plus élevés selon le milieu social et où le diplôme influence le plus les positions sociales. Ce qui joue aussi sur la répartition des salaires. Enfin, l’Insee note "la très forte hausse des revenus du patrimoine, en particulier des revenus immobiliers" et que les dividendes (les revenus des actions) ont été multipliés par cinq entre 1996 et 2021. La France des riches se porte de mieux en mieux. »

 

 

1. L’indice de Gini mesure la répartition des revenus à l’intérieur de chaque pays et la compare à une situation d’égalité parfaite. Plus cet indice est élevé (il est compris entre 0 et 1), plus les inégalités sont importantes.

2. Depuis le milieu des années 1990, les inégalités de niveau de vie augmentent nettement avant redistribution mais de manière plus limitée après redistribution », Henri Martin, in Les revenus et le patrimoine des ménages, Insee références, Insee, octobre 2024.