L'Eurogroupe consolide l'union bancaire

Créé en 2012, le mécanisme européen de stabilité est un outil permettant notamment aux États en difficulté financière de bénéficier de prêts à taux avantageux. Comment cette institution de l'union européenne fonctionne-t-elle ? Pourquoi son rôle a-t-il été renforcé récemment ?

« Le Mécanisme européen de stabilité sera renforcé d'un filet de sécurité supplémentaire, le backstop, pour stabiliser l'union bancaire en cas de crise.

 

La présidence allemande de l'UE a enfin une bonne nouvelle à son actif : la réforme du Mécanisme européen de stabilité ! Elle a été approuvée, lundi soir, par les ministres des Finances de l'Eurogroupe siégeant à 27 (et non à 19). Le Mécanisme européen de stabilité avait été créé au cœur de la crise financière en septembre 2012. Il a pour but de fournir des prêts à des taux avantageux aux pays en difficulté financière qui ne peuvent plus se financer sur les marchés. Ces prêts sont toutefois conditionnés. La révision du traité constitutif du MES sera signée en janvier et ratifiée ensuite par les parlements nationaux.

Les États membres se sont accordés sur le backstop (une réserve de fonds supplémentaire), un filet de sécurité en plus qui renforcera et complétera l'union bancaire de manière à garantir qu'une faillite bancaire n'entraînera pas des conséquences dommageables pour l'ensemble de l'économie ni de l'instabilité financière. Ce backstop apporte en quelque sorte une double sécurité si jamais le « mécanisme de résolution unique » était insuffisant. Il sera opérationnel début 2022, soit "deux ans avant sa date initiale", s'est réjoui l'Irlandais Paschal Donohoe, le président de l'Eurogroupe.

 

L’Italie lève son veto

L’Allemagne a longtemps freiné cette réforme en considérant que les prêts non performants étaient encore trop nombreux au sein des banques italiennes. Mais c'est l'Italie qui avait mis son veto à la réforme du MES, notamment sous la pression du Mouvement 5 Étoiles, qui la jugeait "inacceptable". En Italie, le MES est un mot toxique dans le débat national car il est synonyme d'assujettissement de la souveraineté italienne à l'UE. Roberto Gualtieri, le ministre italien de l'Économie, est d'ailleurs très prudent. Or, la réforme décidée hier vise aussi à adoucir les conditions très strictes, notamment des programmes de réformes, qui avaient été conçues à l'origine du MES en 2012.

"Elles étaient jugées stigmatisantes par les États, pénalisantes ensuite pour leur accès au marché. Par conséquent, ce Mécanisme européen de stabilité n'était pas opérationnel, souligne Bruno Le Maire, le ministre français de l'Économie. De ce point de vue, l'accord qui a été obtenu hier est un accord décisif […] absolument stratégique pour l'Union européenne. Grâce à cet accord, la zone euro va devenir la zone monétaire la mieux protégée du monde face aux crises économiques et face aux crises financières. C'est une deuxième étape de l'affirmation de la solidarité européenne avec la possibilité de venir en soutien des États qui en auraient besoin avec des conditions qui sont beaucoup moins strictes."

S'il a donné son feu vert à la réforme, Roberto Gualtieri a aussitôt prévenu que l'Italie n'aurait pas, de toute façon, recours au MES mais qu'elle n'entendait pas empêcher d'autres pays d'y faire appel. Une ligne de crédit a pourtant été ouverte pour l'Italie au début de la crise sanitaire afin de faire face à la hausse de ses dépenses sanitaires "curatives et préventives". Pour l'heure, Rome néglige ce type de prêts et se finance directement sur les marchés financiers.

 

La Grèce obtient un décaissement de 767 millions d’euros

"Mais ce n'est pas la fin de la route, a repris Paschal Donohoe. Nous continuerons de faire progresser la réduction des risques en utilisant des cadres crédibles existants tels que des tests de résistance à l'échelle de l'UE, des exigences réglementaires renforcées pour des institutions spécifiques et une surveillance renforcée pour faire face aux problèmes structurels."

Par ailleurs, l'Eurogroupe a tiré le bilan des progrès satisfaisants en Espagne, à Chypre, au Portugal et en Irlande sur la base des rapports de surveillance post-programme. Les progrès de la Grèce – sur la base du rapport de surveillance renforcée – ont été salués. Cette évaluation positive a permis à l'Eurogroupe d'approuver, sur la base de l'accord de 2018, le décaissement en faveur d'Athènes de 767 millions d'euros en mesures de désendettement et le remboursement des bénéfices sur les obligations grecques. »