Fin du conflit en Guyane, l'activité reprend
Retour sur le mouvement social mené par le collectif « Pou la Gwiyann dékolé » en Guyane.
Le mouvement social qui paralysait la Guyane depuis plus d'un mois s'est achevé vendredi soir avec la signature d'un accord entre l'État, les élus et le collectif qui pilotait la mobilisation. L'activité du centre spatial de Kourou, interrompue pendant le conflit, doit reprendre ce lundi matin.
L'activité reprendra ce lundi matin, au centre spatial guyanais de Kourou. Les trois lancements, reportés dans l'attente de la fin du conflit social (deux Ariane 5 et un Soyouz), « vont être reprogrammés », a précisé le centre, et seront probablement étalés sur les mois de mai et juin. Quant aux vols aériens de Paris vers Cayenne, ils devraient également reprendre dans les prochains jours.
Le conflit social qui paralysait la Guyane depuis plus d'un mois a pris fin vendredi soir. Un accord a en effet été signé entre l'État, les élus et le collectif qui pilotait la mobilisation.
Dans cet « Accord de Guyane », le gouvernement a notamment pris « acte » de la demande de 2,1 milliards d'euros supplémentaires que formulait le collectif « Pou la Gwiyann dékolé » (pour que la Guyane décolle). Selon l'AFP, cette somme - sur laquelle l'État s'est engagé à ce qu'elle fasse l'objet d'un «examen prioritaire» en vue de sa mise en œuvre, mais sans calendrier précis - s'ajoutera au plan d'urgence d'un montant de 1,1 milliard d'euros déjà validé début avril par le gouvernement (le collectif de mobilisation avait alors jugé cette somme insuffisante). À Kourou, le giratoire à l'entrée du centre spatial guyanais a été libéré par les militants dès samedi après que ceux-ci ont obtenu, comme ils le réclamaient, des garanties sur l'avenir du Centre médico-chirurgical de leur commune, où l'activité doit également reprendre. Dans un communiqué, la ministre des Outre-mer Ericka Bareigts a salué cet accord, évoquant « une journée déterminante pour l'avenir de la Guyane ».
Le Premier ministre Bernard Cazeneuve a salué samedi la signature de l'accord. Fruit d'une discussion « soutenue et fructueuse », l'accord entérine « le plan d'urgence pour la Guyane proposé par le gouvernement et acte de nouvelles avancées en faveur de la Guyane à court comme à moyen terme », se félicitaient les services du premier ministre dans un communiqué. « Cet accord prévoit la levée sans délai de tous les barrages », précise également Matignon.
Par rapport aux premiers accords arrêtés à Cayenne par le gouvernement le 1er avril, ce nouvel accord présente peu d'évolutions, si ce n'est le feu vert du gouvernement pour construire une « cité judiciaire à Cayenne » et l'acceptation que la question de la « rétrocession totale » des terres soit discutée « lors des prochains états généraux de la Guyane ». Il acte également que l'État « fera l'objet d'une saisine, par le congrès des élus de Guyane », sur une « évolution statutaire » du territoire.
Sur le foncier, l'État s'engage aussi « à céder gratuitement 250 000 hectares à la Collectivité Territoriale Guyanaise et aux communes de Guyane », et 400 000 hectares aux Amérindiens et Bushinengués. Le collectif a aussi obtenu la garantie qu'il n'y aurait aucune poursuite envers « les signataires de l'accord ».
De nombreuses interrogations subsistent cependant. A propos des 2,1 milliards d'euros supplémentaires, l'État s'est engagé à ce que la somme fasse l'objet d'un « examen prioritaire » en vue de sa mise en œuvre, mais sans calendrier précis. Une complexité résumée par les propos de Davy Rimane, porte-parole du collectif à Cayenne. «On a réussi à ce que le protocole paraisse au journal officiel. Maintenant on pourra travailler avec ce document et aller en justice si on n'est pas satisfaits », a-t-il expliqué. Certains membres du collectif se sont eux faits menaçants : « Une fois que le prochain gouvernement sera en place, dès le premier jour, on va entrer en action. L'État nous doit sept milliards et pas deux », a asséné Olivier Goudet, membre du mouvement des « 500 frères », dont la particularité est de défiler cagoulés. Le dossier guyanais sera donc l'un des premiers à gérer pour le prochain gouvernement.
Au total, le conflit social guyanais aura donc duré plus d'un mois. Le collectif de mobilisation - représentant diverses composantes de la société guyanaise (socio-professionnels, associations, peuples autochtones, syndicats, etc.) - réclamait notamment des mesures pour renforcer les moyens de lutte contre l'insécurité, désenclaver les communes dont certaines n'ont toujours ni eau ni électricité, mieux reconnaître les peuples autochtones, améliorer les services de santé défaillants et le système scolaire inadapté à une démographie galopante. Une grève générale avait même été votée le 25 mars. De nombreux barrages avaient penalisé l'économie, cloué la fusée Ariane au sol et entraîné des pénuries de produits.